Elsa Gindler (1885 – 1961)

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Elsa Gindler naît la plus jeune de trois enfants à Berlin le 19/6/1885. Le père (forgeron) emmène les enfants souvent dans la nature, leur apprend à faire des tas de choses avec les brins d’herbe.

Elle garde toute sa vie l’amour de la nature et des randonnées. Elle avait rêvé de devenir médecin, mais elle travaille à partir de 1898 à l’usine, devient apprentie commerciale, sténodactylo. En 1906 elle est comptable chez un menuisier, le soir elle étudie la musique, la peinture, la culture grecque, elle s’intéresse aux mouvements physiques « Leibesübungen ». En 1911 elle tombe gravement malade, (Sophie Ludwig affirme qu’il s’agissait d’une tuberculose). En été, elle lit le livre de Hedwig Kallmeyer « Harmonische Gymnastik », elle rencontre Kallmeyer et décide de devenir professeur de gymnastique. Dans une lettre à sa sœur, elle évoque Dalcroze, qui  veut développer  un travail orienté vers la perception et Kallmeyer qui fait un travail plutôt sur le corps. Gindler a rencontré Dalcroze, mais le personnage ne lui plaît pas du tout.

Elle avait assisté à des conférences que Bess Mensendieck donnait à travers l’Allemagne[1]
Mensendieck et Kallmeyer avaient comme professeur commun Géneviève Stebbins.
A partir du 24 novembre 1911 elle participe aux cours chez Hedwig Kallmeyer, elle travaille avec sa camarade Louise Bialonsky, et toutes deux vont présenter leur système de travail à Hellerau, haut lieu de rencontres de toutes sortes.
Elle vit depuis un certain  temps selon les préceptes de Mazdanan (on mange rien le matin, une pomme à midi avec un peu de crème fouettée, légumes cuites le soir)

Le 14/9/1912, elle réussit son examen et avec Bialonsky, elle loue un appartement pour donner des cours. De la fin 1912 à février 1913 elle est malade, souffre des épaules et des cervicales.

D‘avril 1913 à l’automne 1913 elle anime les séminaires de Kallmeyer.

En mai 1917 elle travaille avec Gertrud Markus (von Hollander) qu’elle avait côtoyée chez Kallmeyer, et ensemble elles vont aller voir  Clara Schlaffhorst et Hedwig Andersen à Rothenburg pour à la fois donner et recevoir des cours.

A l’automne 1917 elle commence son propre enseignement (première promotion de cinq élèves) sur l’incitation de Lily Ehrenfried. Elsa Gindler fait venir Clara Schlaffhorst et  Hedwig Andersen de Rothenburg ; elles vont donner des cours de respiration, de voix et de chant.
Très vite elle arrête de «  former » et laisse la formation à ses proches collaboratrices telles que Sophie Ludwig. Mais elle continue à animer des séminaires et des ateliers à thème.

En 1924 elle rencontre  Heinrich Jacoby lors d’une conférence où il fait des improvisations de piano. Jacoby est un pédagogue important dans le domaine de la musique, il fait des recherches sur la voix, le langage. Au centre de son travail est le développement naturel de chacun. La collaboration d’Elsa Gindler et  Heinrich Jacoby va être désormais  très importante ; elle dit « mon travail sans celui de Jacoby n’est pas pensable  ».[2]
Le travail d’Elsa Gindler  change  à la suite de cette rencontre décisive avec Heinrich Jacoby.
Dans son travail, elle s’éloigne des mouvements gymniques à proprement dits, cherche à travers l‘expérimentation du corps à obtenir la présence à soi et aux autres, un certain état d’esprit, une concentration, un état d’être.
Dans son texte « L’homme qui travaille »[3] Gindler nous précise les outils (respiration, détente, tonicité en rapport  avec  la gravité) qu’elle utilise pour son travail.

En 1926 Elsa Gindler et Heinrich Jacoby ne travaillent pas encore ensemble, mais ils fréquentent leur cours réciproquement. Cette même année ils font leur premier cours commun à Keitum sur Sylt.

Jusqu’en 1932 ils organisent des séminaires d’été en commun avec Jacoby à Sassnitz et Hindeland ;

A partir de 1933 les séminaires communs deviennent trop dangereux en Allemagne, suite aux lois de boycott des juifs par le régime nazi.Margaret Locher, organise un séminaire Gindler/Jacoby en Suisse sous l’égide de « L’Association suisse de professeurs de gymnastique »

A partir de 1934 deux sœurs suisses, Ruth et Edith Matter, se chargent de l’organisation des deux cours annuels où Gindler et Jacoby travaillent ensemble. Les sœurs Matter vont s’occuper du visa de Jacoby en Suisse, elles l’hébergent et jouent de toutes leurs influences pour assurer une continuité du travail de Jacoby/Gindler dans l’organisation des séminaires. En 1934 c’est leur premier cours à toutes deux auprès d’Elsa Gindler et Heinrich Jacoby.
Grâce aux sœurs Matter, la collaboration Gindler/Jacoby a pu se faire jusqu’en 1938.

La période de la guerre – où Gindler continue à donner des cours à Berlin – fût terrible pour elle. En dehors de privations de vivres, d’eau, d’électricité, elle souffre d’avoir perdu des amis en déportation, de n’avoir de nouvelles  ni des uns  ni des autres, du retournement anti-juive de sa propre famille. Berlin est sans cesse bombardé. Sophie Ludwig  est à ses côtés depuis le début des ans 1920.Elles dorment habillées, font leur cours dans les abris surpeuplés où tout donne lieu à l’expérimentation : les mauvaises odeurs, la peur, l’angoisse du lendemain….

Son atelier, part en flamme suite à une bombe incendiaire le 27/4/1945..Elles se réfugient après la destruction de Berlin chez  Elfriede Hengstenberg à Wilmersdorf, dont la maison est intacte. Elles peuvent enfin se laver pour la première à l’eau chaude. Elsa Gindler a 60 ans.

Elsa Gindler et Sophie Ludwig reprennent rapidement après la guerre un appartement et leurs cours, mais il n’y a qu’en 1953 que Elsa Gindler fait état d’un niveau de cours égal à celui d’avant-guerre.
Les préoccupations de Gindler étaient essentiellement de réveiller en chaque élève la possibilité d’apprendre, d’expérimenter, d’éprouver. L’expérimentation avec respiration, tension et relâchement physique comme processus corporel pouvant être correcte ou incorrecte. Ella a beaucoup travaillé sur la capacité de l’organisme de se régénérer, d’exécuter les mouvements gymniques de manière « vivante » et pas de manière mécanique c’est-à-dire de les ressentir, de les percevoir, d’en être conscient, en insistant sur le fait que cette conscience conférait à la personne une présence,  une prestance perçue de l’intérieur.  Elle n’était pas intéressée par les idéaux de beauté et de performance  mais par la capacité et l’aptitude à percevoir, à s’ouvrir, et à être curieux de découvrir quelque chose de nouveau.
Elle aimait dire de son travail que c’était un travail sur l’Homme. Les notions de respiration, de tonicité et de détente auxquelles elle a donné une place de choix ont été reprises par la branche française de Gymnastique Holistique.
Elle décède le 28 septembre 1961 à Berlin, elle sera enterrée avec sa disciple Sophie Ludwig et son amie Elfriede Hengstenberg dans la tombe de celle-ci.

[1]   «  Auf dem roten Teppich » p. 71  Frieda Goralewski
[2] Elsa Gindler- von ihrem Leben und Wirken. 2002. Christians Verlag.200p. Rubrique: Bibliographie

[3] Texte publiée pour la première fois en 1926 dans la revue « Gymnastik » Jahrgang I. par  le Deutschen Gymnastikbund (Fédération de Gymnastique Allemande)

HEINRICH-JACOBY / ELSA-GINDLER STIFTUNG , 2002 .«Elsa Gindler-von ihrem Leben und Wirken». Hamburg.Hans Christians Verlag 200p. ISBN 3-7672-1398-2

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